Blanche et pâle

Blanche et pâle

Adèle ZVENIGOROSKY – 4e A

Enseignante : Mme Amourette

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Je m’appelle Lucie, je suis atteinte d’une maladie qui me gâche la vie, je suis albinos… Cette maladie, je la déteste, je la hais. Elle éloigne les autres de moi et je ne peux que me renfermer sur moi-même.

Je suis seule, si seule.

Il y a huit ans, mon père tua ma mère sur un coup de tête avant de mourir lui-même d’overdose dans une prison spécialisée en Suisse, car il était décidément trop violent.

Je suis vraiment seule.

j’habitais en ville chez une très gentille dame avant de devoir partir à cause des moqueries de mes camarades. Désormais, je résidai en campagne dans une sorte d’usine à enfants où je travaillais comme les grands, je ne mangeais quasiment plus et je mourais petit à petit de faim, de froid, j’avais le moral démoli. Les rares fois où j’avais le droit de manger, les autres enfants me traitaient de ‘sans couleur’, ils me disaient que je ne servais à rien, que je n’étais personne…

Que je ne suis personne. Mais je suis quelqu’un moi, je m’appelle Lucie, j’ai quinze ans et je veux vivre !

Parfois je pensais à des choses horribles, comme si mon esprit s’assombrissait soudainement, comme si une multitude d’idées négatives me hantaient… Un jour, j’envisageai de recommencer une vie… Tuer quelqu’un, prendre sa place et repartir autre part, autrement, sans doute mieux. Mais moi, tuer ? C’était n’importe quoi ! J’en étais incapable…

Un jour, en me levant, je repensai à cette idée, je passais une journée habituelle, sauf que cette obsession ne me quittait plus, j’en avais la tête qui tournait tellement j’y pensais, je pleurais… Je restais enfermée, cachée, dans une pièce, seule, en pleurs, à me poser cent questions. Au bout de trois jours, je me décidai enfin à sortir. Une fois arrivée à la cantine, je mangeais tout ce que je pouvais. Une bande de filles vint vers moi, elles m’insultèrent comme d’habitude, mais là, je me défendais, elles furent très étonnées. Je partis de la cantine, puis conçus un plan pour m’évader de cette prison ; le lendemain je m’échappai. Le matin de mon évasion, j’eus peur, une boule au ventre. J’avançai vers le chemin que j’avais établi la veille mais des doutes ressurgissaient. Je ne connaissais pas dehors, l’extérieur, je ne savais pas ce que c’était, bientôt sept ans que je n’étais pas sortie. Ma peau ne devenait pas moins belle quand je ne sortais pas, car elle était tout le temps moche. Après une demi heure d’hésitations, je me décidai à y aller.

« Je préfère mourir libre que vivre en prison », c’était ce que je me répétais sans cesse pour me donner du courage. Je sortis par la porte de derrière, passai par ‘mon’ chemin. Enfin, j’étais dehors ! J’étais enfin libre, je m’éloignais, je pleurais tellement j’étais heureuse ! Je me ressaisis et marchais jusqu’à un hôtel. Mon plan : les amadouer pour pouvoir commettre l’impensable, tuer quelqu’un pour prendre sa place…

Quand j’arrivais, j’endossais immédiatement mon rôle. J’expliquais que j’étais majeure, que je n’avais pas d’abri et que j’avais perdu mes papiers, mon téléphone, ma carte bancaire enfin tout quoi. La dame hésita longtemps et finit par me donner une chambre que je m’engageais à rembourser quand ma situation se serait améliorée. Elle m’avait confié la chambre 19, à côté d’une jeune fille d’à peu près mon âge avec sa mère, chambre 21. En face, chambre 20, une dame vêtue de couleurs vives, bien habillée et qui semblait avoir beaucoup d’amis, la proie parfaite, celle que j’attendais !

Le soir même, la dame qui m’avait accueillie vint dans ma chambre, elle m’annonça qu’elle avait des doutes sur moi, elle croyait que je voulais faire un mauvais coup, elle n’avait pas tort. Je me rendis

vite à l’évidence, je devais me débarrasser d’elle ! Elle m’affirma qu’elle voulait bien croire ce que je lui disais à condition que ma situation ne dura pas plus d’une semaine. Mais une semaine pour réaliser mes plans, puis passer à l’acte, c’était impossible.

Le lendemain matin, je commençais mes recherches sur mes voisines. Vers onze heures du matin, je descendis de ma chambre pour arriver à l’accueil et m’infiltrai discrètement dans les bureaux, quand il n’y avait personne. Je pris les documents de renseignements sur mon étage puis je retournai dans ma chambre.

Ensuite, je regardais tous les dossiers jusqu’à trouver plusieurs personnes qui avaient l’air heureux, qui étaient plutôt riches et qui avaient de bonnes conditions de vie. Je me dis que ce serait bien de recommencer directement dans tout à zéro, sur de bonnes bases, pourquoi me priver ? J’oubliai vite ma voisine d’en face car je venais de cibler la fille idéale. Elle s’appelait Marie, elle était très jolie et très riche. Le doute commença à s’installer, « comment me rendre aussi belle » ?. J’avais bien pensé à la chirurgie esthétique mais c’était beaucoup trop cher ! Et même si je volais de l’argent à droite, à gauche je n’arriverais jamais à réunir une somme suffisante en une semaine… je ne savais plus comment faire, tout cela était impossible, être arrivée jusque là, prête à commettre l’impensable, je n’y croyais pas comme si je me choquais, me dégouttais moi-même. Je faisais quelque chose d’affreux et je venais de m’en rendre compte…

Le temps de penser à tout ça, il était déjà très tard. Je me couchais et m’endormais aussitôt.

Pendant que je dormais, enfin, je ne savais pas si c’était la réalité ou mon imaginaire qui me jouait des tours comme il le faisait parfois, je vis une sorte de fée qui me dit des choses étranges comme si elle parlait une autre langue. J’essayais de comprendre comme je pouvais mais rien à faire, je n’y comprenais rien. Après un long discours de charabia, elle finit par me tendre un poignard magnifique, c’était incroyable, il brillait d’une multitude de couleurs, j’y voyais tout ce que je rêvais d’être : belle, brillante, aimée et acceptée, scintillante dans les yeux de celui qui me regarderait. Je le pris. Avec très peu de souvenirs, je me réveillais le lendemain tenant ce poignard, je le redécouvrais, mes doigts serrés autour du manche.

Cela faisait déjà 3 jours que j’étais dans cet hôtel, je n’en pouvais plus, il fallait exécuter mon plan ! Alors, le jour même, je fonçais ! Peu importe comment j’allais faire pour lui ressembler !

Je tuerais Marie !

En début d’après-midi, j’allais la voir dans sa chambre 24, je voulais savoir si elle était gentille, douce, ses goûts, etc. je voulais m’approprier son personnage. Quand j’arrivais devant sa porte, elle sursauta de surprise, de dégoût ? Elle était exactement comme les autres, elle aussi finirait par m’insulter, je n’en doutais pas. Je fis tout de même bonne figure afin de mieux me rapprocher d’elle et de la poignarder avec mon beau poignard dès que l’occasion se présenterait. Je rentrai donc chez elle sans trop de difficultés, je pensais que je lui faisais pitié. Mais elle allait voir de quoi j’étais capable !

J’apprenais beaucoup de choses en lui parlant, Marie ne se doutait de rien, je notais dans un coin de mon esprit qu’elle aimait nager, qu’elle avait une passion pour la mer et surtout pour les dauphins. Elle préférait le rose, elle était très féminine avec beaucoup de manières, c’était très drôle à voir. Elle était aussi très jeune. Je n’avais pas seulement appris des choses, j’avais aussi mis subtilement trois somnifères dans sa carafe d’eau quand elle s’était absentée pour aller se laver les mains.

Quand je retournais dans ma chambre, je décidais que je passerais à l’acte la nuit-même. Mais je repensais vite à l’hôtesse qui me soupçonnerait à coup sûr… Je n’étais pas tranquille, alors je décidai de m’occuper d’elle le soir, à minuit pile avant d’assassiner Marie.

A l’heure dite, je descendais à l’accueil au moment où l’hôtelière fermait son établissement. Il

étaient deux, j’attendais que le deuxième employé parte pour brandir la grande barre de fer que j’avais trouvée dans un coin. Quand l’homme fut enfin parti, je fonçai sur la femme et la frappai à la tête, elle tomba. La propriétaire mise K.O., je pouvais enfin recommencer ma vie en partant de celle, avortée par mes soins, de Marie.

Je passais dans ma chambre prendre mon magnifique poignard quand je fus prise de remords, elle ne m’avait encore rien fait … Mais comme tous les autres elle finirait par me détester et me critiquer. Je pris mon poignard, sortis de ma chambre, allai chez Marie qui avait sûrement avalé les somnifères que j’avais mis dans sa carafe…

Devant sa chambre, l’oreille collée à sa porte, j’entendis qu’elle dormait profondément. J’ouvris la porte, m’approchai de son lit, et la poignardai d’un sang froid époustouflant.

Voilà, je l’avais tuée…

Une nouvelle vie commençait pour moi : j’allais prendre sa place, me transformer en elle et recommencer tout à zéro. J’étais libérée, le soulagement l’emportait sur l’horreur de mon geste.

Je tombai brusquement d’un coup sec, je me retrouvais par terre, mon poignard toujours dans la main. Je sentais mon visage fondre, sensation terrible, mon visage brûlait, je m’enflammais ! Je me levai, allai voir mon reflet dans le miroir de la chambre de Marie et je la vis, elle, dans mon reflet. J’étais devenue cette fille comme par magie, comme si mon esprit m’avait aidée à devenir Marie. Enfin, j’étais belle et brillante comme le poignard que j’avais vu, merveilleux… Mon rêve se réalisait enfin, j’étais belle et pétillante. Nous étions désormais deux Marie identiques sauf que la véritable Marie était morte…

Cette nuit-là, je passais tout mon temps à me regarder, à m’analyser sous toutes mes coutures voir mes belles couleurs et mes beaux yeux verts, je finis par m’endormir dans la chambre de Marie devant mon reflet, avec l’idée réjouissante d’avoir réussi, la promesse de mener une vie belle et agréable et la satisfaction de disposer, en plus, d’un compte en banque bien garni !

Le lendemain du meurtre, je me retrouvais dans la chambre de Marie où j’avais passé la nuit, j’ouvrai les yeux, me retournai. Quelle surprise ! Quel drame ! Le corps de Marie n’était plus là. Comment allais-je faire si par malheur quelqu’un l’avait trouvé sur le lit. Une Marie double, l’une endormie, l’autre morte, poignardée… Il ne faisait aucun doute que cette personne, prise de peur, s’était empressée d’avertir immédiatement la police et tout le personnel de l’hôtel, j’étais fichue. L’après-midi même, je quittais l’hôtel en tant que Marie. Heureusement, personne ne remarqua l’absence de Lucie, l’autre moi, l’autre, dès cet instant, j’étais légitimement devenue Marie…

Le lendemain après une nuit passée dans un autre hôtel à l’autre bout de la ville, sous un autre nom pour ne pas éveiller la curiosité de certains, j’avais retrouvé le corps de Marie près d’un fleuve, j’étais abasourdie. Comment cela pouvait-il être possible ?! Je recommençais à me poser cent questions, comment était-ce arrivé ? Qui l’avait transportée ici, à la vue de tous, qui l’avait découverte avant moi ? Après avoir appelé la police pour signaler anonymement la découverte de ce cadavre – mon cadavre à dire vrai – je m’enfuis de la ville. Toujours aussi seule mais avec de beaux yeux verts et de magnifiques cheveux, je me dis que la mort de Marie n’aurait de sens qu’en recommençant une autre vie, comme si ce corps et cet esprit venaient de naître.

Maintenant je réside à New-York, j’ai beaucoup d’amis et je vis une vie normale. Je ne parlerai jamais de mon étrange passé, et resterai éternellement mystérieuse… C’est ce qui faisait mon charme !

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